
Un été en Lorraine pas comme les autres
Première partie
Le train
Me voilà dans le train, direction Metz, enfin! Après tant de mois d’attente insupportable loin de mes parents, pour rentrer chez moi. Oui chez moi, en Lorraine, là oui j’ai grandi et où j’ai eu la chance d’apprendre à être heureuse et d’apprendre à aimer la vie et ses valeurs . Je suis enfin dans ce train, avec mon masque sur le visage, qui me donne chaud et m’empêche de respirer convenablement, mais c’est ainsi. Je travail pour que le trajet passe le plus vite possible.
L’amour
Nous sommes en Juin. Le 15 Juin exactement, j’arrive le soir, chez mes parents. Plusieurs raisons pour lesquelles j’avais tant hâte de rentrer. J’aime mes parents de tout mon coeur, il me manquaient énormément, Maman est très fatiguée et Papa à un cancer du rein depuis 5 ans. Et son état se dégrade vite, trop vite. Alors ilétait temps que j’arrive. Car le temps est compté.
“Nous ne sommes jamais assez préparés…
Arrivée à Metz
Je suis là, Maman m’accueille à la gare de Metz. Nous nous serrons si fort. Nous oublions toutes les recommandation Covid actuelles. On s’en fou. Notre amour est si fort, que rien, rien ne m’empêchera de nous serrer dans nos bras. On pleure. On sourit. On prend la route pour la maison. Je n’étais pas prête pour affronter ce que j’allais voir.
Papa dans le canapé, dans son peignoir d’hiver, nous sommes mis juin… il a froid. Il est blanc. Il parle très faiblement. Il tremblote. Je ne peux le serrer dans mes bras qu’une fois avoir pris une douche chaude et m’être bien désinfectée. Alors j’y vais vite, car l’attente de le serrer contre moi n’est plus supportable.
Je suis douchée. Je descend vite de la salle de bain le prendre dans mes bras, sans l’embrasser et avec mon masque. Horrible mais beaucoup de bonheur. Je suis là papa. Je suis là. Et nous allons combattre ensemble cette foutue maladie qui te pourrie la vie. Je suis là, pleine de force et d’une combativité pour 1000! Oui, j’y crois, nous allons y arriver. L’espoir existe. Le lendemain, le 16 Juin, rendez-vous chez le cardiologue à 7h45.
Cardiologue
Rdv en dernière minute. Nous y allons. Nous aidons papa, maman et moi, à marcher, car seul il n’y arrive plus. Tout effort l’épuise et l’essouffle terriblement. Mon coeur souffre mais je reste forte. Je n’ai pas le choix. Pour maman, pour papa. Après 40 minutes de route, nous sommes dans la salle d’attente. Vue l’heure, 7h45, nous sommes les premiers. Avant même la secrétaire.
Le rendez-vous terminé, nous avons la conclusion. Il faut des bas de contention et une prise de sang à faire pour vérifier une chose. Pas plus d’informations bien que le cardiologue fut été cordiale et bienveillant. C’était sans compter sur les résultats du scanner de contrôle de son cancer du lendemain….. Sur la route du retour, j’appel le médecin traitant de papa pour la prescription des bas de contention. Cela tombe “bien”, car je souhaitai vivement m’entretenir avec le médecin pour qu’il m’éclaircisse la situation. Rentrés à la maison je fais une sieste de 20 minutes et je repars pour le médecin.
Premier choc
J’aurai du me préparer. “Il est en fin de vie, je vous conseil de profiter de lui tant que vous le pouvez”. Cette information résonnait dans ma tête sans que je ne la comprenne. Je m’effondre en larme et lui demande de m’expliquer, car papa ne mange plus depuis des semaines et rien ne se passe! Les oncologues ne peuvent pas le voir en rendez-vous à cause du Covid, et le médecin lui dit de manger. Point. Incompréhension totale de ma part.
Même s’il ne pu voir les oncologues, sont médecin, censé être compétent, aurait pu trouver la solution que j’ai fini par trouver dans un livre sur la nutrition et le cancer, de le nourrir par voie parentérale. C’est à dire, via son cathéter déjà installé pour une de ces nombreuses chimiothérapie, pour l’aider à se nourrir.
Mais non. Donc je ne comprends pas comment ce médecin traitant n’ai même pas contacté les oncologues pour leurs faire part de son état de dénutrition totale. Oui, je ne l’ai pas dit, mais papa était d’une maigreur effrayante. Face au médecin, que j’aurai voulu étriper de mes mains, je m’effondrai totalement face à ce qu’il venait de m’annoncer.
Maman
Les questions affluent, comment je l’annonce à maman? Comment est-ce que je lui dit? Est-ce que je le garde pour moi ? Je ne le sais pas. Il me fallut un moment dans la voiture sur le parking pour me remettre. Debout depuis 6h30, cardiologue, route, médecin, cela faisait même pas 15 heures que j’étais arrivée, que j’étais déjà épuisée et sous le choc.
Je rentre enfin à la maison. Il est 13h passé. Je grignote un bout et maman est dans la cuisine à m’attendre. Papa est allé se coucher. Je tente de garder mon sang froid et de ne pas lui dire ce que le médecin venait de m’apprendre. Difficile. Et puis, je trouve les bons mots pour ne pas que cela soit autant choquant et sans tout à fait lui dire tout ce que j’avais entendu. Et puis, je vais me reposer. Je ne me souvien plus du reste de cette journée qui était déjà comme si j’en avais fais 2 ou 3.Nous étions déjà très fatigués. Mais c’était sans compté sur ce qui nous attendait le lendemain.
Le lendemain
Mercredi 17 juin. Anniversaire de papa.
Oh cette journée. La pire journée de toute ma vie. Cette journée où tout mon monde s’est écroulé. OUI tout notre monde s’est écroulé sous nos pieds. Les enfers nous avaient ouvert leurs portes avant même que nous le sachions. Les larmes me montent en écrivant cela. Comment sortir d’une journée aussi terrible que celle-ci. Je ne le sais pas. Je suis dans le canapé, devant mon ordinateur et je commence à avoir très chaud. J’enlève mon pull. Mes yeux sont mouillés et mon coeur bat. Mais j’ai besoin d’écrire. D’écrire toute cette tragédie.
Mercredi 17 Juin 2020. Aux alentours de 9h30, nous prenons la route pour l’hôpital de Mercy à Metz pour faire le scanner de contrôle de papa. Nos masques sur le visages, nous montons dans la voiture pour 1h15 de route. Il pleut. Le temps est triste. Le temps est gris et les gouttes de pluie s’écrasent sur le pare brise. Les essuies glace gardent le rythme. Papa est à l’arrière de la voiture, silencieux. D’ailleurs nous le sommes tous les trois.
La route
Nous détestons faire cette route. D’autant que nous savons que les mauvaises nouvelles vont tomber. Nous ne sommes pas sots. Sur la route, tragique accident de voiture, qui me transit d’effrois, je me paralyse, je suffoque, la poussette au milieu de la route me glace le sang. La voiture est seule. Écrasée en plein centre. Il ne reste rien de la voiture. Ma réaction est réel, mais peut-être que mon cerveau bug, car vu notre situation, je ne pu maîtriser ma réaction. J’imaginai le bébé mort, écrasé dans cette voiture, les parents qui projettent des vacances, ou qui rentraient chez eux.. Jamais ils n’eurent ce bonheur.
Moi toujours paralysée, les larmes coulant sur mon visage maman continuait de rouler, papa silencieu, toujours. Je me sentis très seule. Puis je me ressaisi en pensant à nous. L’hôpital n’était plus très loin. Enfin nous arrivions, en passant devant un bâtiment criblé de balles pendant la guerre. Vestiges de l’époque. Maman nous dépose et papa au bras, je l’accompagne à l’intérieur. Cette marche lui fut difficile bien qu’il ait fait l’effort. Maman nous a rejoins dans le couloir de l’attente. 15 minutes d’attentes et papa faisait son scanner. Toujours cet ambiance de masques. Nous attendons patiemment.
Notre monde s’écroule
Papa sort et une de chaque côté, bras dessous bras dessus, nous partîmes vers la voiture pour rentrer à la maison, car il n’est plus possible d’attendre les résultats sur place à cause de la pandémie. Au bout de plus de 30 minutes de route, j’entend le téléphone de maman sonner. Trod tard, je rappel. C’est l’hôpital qui nous rappelait. “Mr Duplaix doit tout de suite intégrer l’hôpital d’oncologie”. Sans un mot de plus.
C’est là que tout notre monde s’écroula d’une manière si brutale, que maman me demanda “mais quoi, mais que se passe t il ?” “Maman, fais demi tour et on retourne à l’hôpital” lui répondis-je. Je ne me souviens plus de la réaction de papa, parce que ce qui m’importait c’était que maman garde son sang froid et sa concentration afin de ne pas faire un accident, à notre tour… Mais papa fut d’un silence de plomb, tant il fut sous le choc.
De mon côté, j’étais en enfer, je pleurai si fort, j’étais à l’arrière de la voiture et je prenais papa par les épaules car il était devant moi sur le fauteuil passager. Je pleurai, je pleurai, je pleurai. Maman roulais. Papa était silencieux. Et nous ne savions pas ce qu’il se passait. Car l’hôpital ne nous dit rien de plus. N’oublions pas que ce jour était l’anniversaire de papa. Il faisait ses 71 ans….
Hôpital Bis
Ticket de parking, maman se gare, nous marchons vers le service voulu. Ils prennent papa en charge, on ne nous dit toujours rien, “attendez dans la salle d’attente”. Horrible, nos coeur en suspension. Le regard plus qu’inquiets. J’ai eu l’impression qu’on me l’arrachait! Je croyais qu’il l’emmenait en salle d’opération car les métastases étaient trop développées, et qu’il allait mourir et que je ne pourrai lui dire au revoir. PAPAAAAAA!!! Ne t’en va pas! C’est que je me disais.
Mes yeux étaient grands ouverts, en attendant. L’angoisse montait. Personne ne venait nous voir pour nous expliquer. Maman était aussi très très inquiète. Alors je me lève et vais chercher quelqu’un dans toute ma détresse. Et là. Et là, une infirmière me dit, tranquillement, comme si nous n’étions pas sous le choc ou comme si tout allait bien, que papa a fait une embolie pulmonaire de bas grade et qu’il lui ont fait une injection et une prise de sang.
Mais papa n’était pas au bloc, mais bien dans une chambre en train de se reposer. Je compris pourquoi il était si faible quand je l’ai retrouvé ce lundi soir, 2 jours avant tout cela. Mon coeur se mit à battre d’une autre façon encore, de joie peut-être, parce que ce n’était pas encore sa dernière heure, bien qu’elle fut arrivée quelques jours après…. Quelle belle journée d’anniversaire….
La nouvelle
“Monsieur Duplaix” dit-il avec son accent Italien, il fut surpris de nous voir présente et en profita pour nous annoncer la nouvelles à tous les 3.” Monsieur Duplaix, votre cancer, la maladie a pris le dessus. Je sais que vous appréciez la franchise, les métastases ont prit le dessus et se sont installées partout”. Nous le regardions, attentivement, prenant cette nouvelle en pleine face. Les yeux écarquillés, se remplissant de larmes, ça y est, nous savons que c’est la fin.
Ils le gardaient 2 jours en plus de cette journée. Le lendemain, nous apportions à papa son gâteau d’anniversaire, il faillit pleurer mais il se retenu. C’est la tradition chez nous. Et nous ne voulions pas l’enlever. Le lendemain, le 18 juin, un des oncologue de papa lui rendit visite dans sa chambre pour lui donner le reste des résultats du scanner qui n’avaient pas encore été donné. Il faut avoir les épaules solides je vous le dis.
Si triste
Mon coeur se déchire. Le cerveau déconnecte. Mes yeux se noient, mon coeur se noie. Papaaaa!!! Je serre les dents, je serre mes poings, je tâche de rester calme, pour maman et pour papa. Je coule, en toute discrétion dans les abysses de la tristesse. Mon papa va mourir très bientôt. C’est sur. On encaisse. On reste encore avec papa, puis nous devons partir, à cause des temps réglementaire du covid. Maman reprend le volant et je la sent très distraite, alors, je lui demande de s’arrêter pour que je reprenne la route. Nous arrivons saines et sauves à la maison, tendues, tristes, dépitées, épuisées…
A la maison
Je ne sais plus si c’est le lendemain ou le surlendemain que nous pouvions aller le chercher et le ramener à la maison , mais nou savons finis par le ramener et en meilleur forme, car les piqures contre l’embolie semblaient marcher. La notion du temps à commencer à disparaître. De mon côté, j’avais du travail, donc le soir, jusque tard, minuit 1h du matin, je travaillais, pour avoir la journée avec maman et le temps de visite à l’hôpital. Mes journées étaient clairement divisées en trois.
Le matin je travaille pour mon client et pour moi, le reste de la journée je me libérai pour mes parents et le soir re-belotte pour mon client. Je ne savais plus où j’étais, mais il y a cette force qui fait que tu ne lâches pas et que tu continue. Tel un robot, tu ne penses plus à te reposer ou à prendre du temps pour toi. Les priorités sont tellement plus importantes et tombent sous le sens. Mais tu ne dois pas abandonner tes projets. C’est tellement dur, mais tu le fais. Machinalement, jusqu’à l’épuisement total.
Papa rentre enfin à la maison. Nous somme heureux de pouvoir être tous les trois à la maison. Je m’attèle à des travaux dans une pièce en bas de la maison pour en faire une chambre, car la cousine de maman vient nous voir en aout et elle est dans un tel état que je dois toute refaire. Boucher les trous, refaire la peinture ,le sol.
C’est donc que je me lance dans ce chantier, le soir, quand mes parents sont couchés et que j’ai pu profiter d’eux. Je ne ressens plus la fatigue tant je suis épuisée. Je me suis transformée en une machine qui essaie de faire au mieux, car je sais que les jours sont comptés et que j’aimerai que papa soit fière de moi une dernière fois. Et j’eu raison, car ce fut la dernière fois qu’il pu être fière de moi… Quelques semaines plus tard papa succomba à son cancer…..
Le 9 Août 2020, dans la chambre que je venais tout juste de finir…